(Ou « L’explication en trois volumes du pourquoi tout le monde participe sans le savoir, ni le comprendre, à l’élaboration d’une société numérique particulièrement bien rythmée ». Mais c’était un titre plus long…)
Tout le monde y va de son article, de son infographie, et de son encadré « profond-du-conseil ». Bref : tout le monde s’agite dans tous les sens, hurle dans tous les sens. Pour dire la même chose que le voisin, et globalement remplir cet appel d’air créé par les fêtes de fin d’années.
Si l’on dit que la nature a horreur du vide… Internet aussi. Enfin, si l’on excepte les expressions « vide de sens » ou « vide d’intérêt »…
Et c’est dans ce contexte de fourmillement numérique frénétique que je vais vous expliquer pourquoi vous vous pliez à cet exercice, et pourquoi, moi, je ne le fais plus.
L’appel de la plume : de l’œuf, ou de la poule ?
Est-ce qu’il y a un vomissement de contenus entre le 30 décembre et le 15 janvier parce qu’il est nécessaire d’évacuer ce qu’on a bien pu ingurgiter pendant les fêtes ? Est-ce que c’est lié au principe de vœux, à la tradition ? Est-ce que c’est par facilité, flemme ? Ou est-ce encore un effet de mimétisme ?
Tout ça à la fois, mais je remarque que tous se pressent de produire ces fameux marronniers :
- Les bonnes résolutions en $metier pour 2017 !
- Top 10 des prédictions pour 2017 *
- Les meilleurs vœux de $societe pour 2017
- Rétrospective de l’année 2016 en $domaine
- « Mes » objectifs pour l’année 2017 *
Eh oui, je l’ai fait, et j’assume. On en reparle à la fin, mais déroulons d’abord les prémices de la théorie…
Du poids des dates
Les dates ont un poids énorme. Nous, humains branchés, adorons nous remémorer les choses et faire de tout et de n’importe quoi des symboles ou des traditions. Nous avons soif de passé, à défaut d’entrevoir un avenir… ?
Et en instaurant une certaine récurrence et importance dans ces dates, en les transformant en tradition, on construit un rituel. Et les rituels servent à l’élaboration des sociétés.
Où je veux en venir ? C’est qu’il ne faut surtout, SURTOUT PAS négliger ce phénomène : Internet n’est pas une toile à proprement parler. Elle est plutôt une fédération (de mon point de vue), constituée d’une multitude d’états et de pays, de royaumes et de micro-sociétés.
HEIN? Je vais pas développer ce point car ce n’est pas le sujet, même si j’avais exprimé les bases à échelle humaine il y a peu.
En revanche, gardez en tête que si l’on voit le Net comme des pays, on accepte l’idée qu’il se nourrisse d’histoires et de mythes à l’instar des sociétés. Et pour parfaire ce mimétisme, il a besoin de rituels, de dates, et de culture.
Jeune culture (Celle du Web), elle reprend donc nos codes « irl ». Et cela passe par Noël, le Nouvel An, etc. À noter qu’il y aurait un article entier à consacrer à cette idée, et que je vous présente ce concept afin de servir le propos initial (si vous vous en souvenez…).
Ainsi donc, publier quelque chose sur le Web, bouger le curseur légèrement aux dates emblématiques de la culture irl dans laquelle vous évoluez est primordial. C’est une façon de vous inscrire, d’inscrire votre {Marque|Blog|Branding} dans la société de votre Internet.
Ne pas le faire, serait comme vous exclure de cette société. Et on sait comment c’est vu…
Du poids de l’Autre
Donc s’il est communément admis qu’il « faut » marquer le coup, on peut se dire que l’Autre, Bertrand le CM cool, Corine la Chef de Projet, ou encore Julien le Chargé de Comm’ ; on peut se dire qu’ils vont se fendre d’un petit truc « drôle et innovant » qu’il faut tout de suite effacer par SON PRORE GROS TRUC PLUS INNOVANT ET PLUS DRÔLE !
Et ce point est important : dans une société, il faut faire comme les autres… Mais en mieux. En tout cas dans les nôtres. Car nous avons gardé cela de « l’irl », c’est peut-être plus accentué sur le Web : nous devons justifier notre existence en démontrant qu’elle est importante et unique. Mais genre « plus plus ».
On ressent le besoin de faire ces contenus, car on les voit comme étant des obligations. La preuve que nous existons dans cette société. Et l’on croit, à tort, (et je vous l’expliquerai) que si l’on ne se conforme par à cette norme, cela se verra, et sera très mal vu.
De l’art de ne pas se faire chier la bite
Et ça, faut bien l’admettre, mais céder aux sirènes des marronniers, c’est s’offrir quoi… ? Pas moins d’une dizaine de billets par an déjà écrits ? Pis c’est pas comme s’ils différaient vraiment d’une année à une autre.
Les codes sont les mêmes. Les phrases relativement similaires, et finalement, la réaction de sa communauté est uniforme : elle va partager mollement après avoir lu en diagonale. Spécialement si elle ne produit elle-même rien (profitant donc de l’effet « regardez, moi aussi je souligne ces dates »).
Et si elle en produit, ça sera pour pomper la moitié de vos idées… Que vous aviez déjà pompé à d’autres. Quand ça n’est pas à vous-même l’année dernière. Hein ? T’as vu ? On s’comprend.
Publier à ces dates, c’est donc s’éviter la question du « qu’est-ce que je vais publier en décembre/janvier ? »
Donc, vous écrivez en cette période parce que c’est :
- Ce qu’il faut faire
- Facile
- Et par souci de concurrence
[EDIT] C’est de la faute à Google
Et de ses confrères, of course. Enfin, ça, c’est pas moi qui le dit, c’est Stéphane Briot qui me l’a rappelé justement sur Facebook : il peut être utile de publier pour actualiser son site/blog aux yeux des moteurs de recherche.
Et ça recoupe les considérations Marketing, et les impératifs liés au commerce, au branding, etc.
Mais ça ne sert à rien
Mais alors… A rien.du.tout.
J’ai déjà prouvé qu’un contenu calibré « comme il faut » est partagé sans être lu (voir lien précédent). Et nous savons que ces articles/contenus de début d’année sont encore plus « clichiés » que les articles/contenus de base.
L’œil du lecteur va d’autant plus survoler ça qu’il va être totalement pris d’assaut à cette période par tout le monde. Et la saturation viendra presque immédiatement.
Donc, à moins d’être réellement original, ce que vous faites ne sert à rien. C’est là pour remplir votre site/blog/support, et montrer que vous êtes comme tout le monde : « unique et drôle hi hi hi ».
Et être original en cette période, c’est impossible. Pas avec cette profusion de contenus et d’idées qui vont fuser. Peut-être qu’une ou deux têtes va nous cracher LA BONNE IDEE de l’année, qui sera reprise par tout le monde avant la mi-janvier, mais, fondamentalement, les cartes de mauvais goûts, et les promos moyennement intéressantes vont fuser, et vous, moi, eux, allons surtout partager de la merde. Chaque année.
Pourquoi il ne faut pas poster en janvier ?
Premièrement parce que tout le monde le fait, que vous ne voulez pas être tout le monde, et qu’il est impossible d’être original en faisant comme tout le monde. Ceci, mes amis, c’est le gros mythe de la Comm’ en général : faire du neuf avec du vieux… Ça n’est pas « faire ». C’est « recycler ».
Second point que je vous propose sous forme d’auto-citation :
Pourquoi hurler dans une pièce bruyante, quand chuchoter dans une salle silencieuse est autrement plus puissant ?
En d’autres termes : il n’est pas rare qu’à l’occasion de la nouvelle année, vous présentiez votre nouveau produit, votre nouvelle idée, etc. Parce que c’est « l’occasion de proposer du neuf ». Rien que ça, c’est tout sauf novateur.
Combien sommes-nous à hurler nos marronniers et nos nouvelles idées du 15 décembre au 01 février, hum ?
Patientez. Sagement. Sachez publier AU BON MOMENT. Quand toute la faune s’est endormie, que la jungle redevient calme, là, et seulement là, murmurez votre nouvelle… Et je vous assure qu’elle sera entendue avec plus de force que si vous deviez jouer des coudes avec les autres « lions ».
Tu dis ça, mais tu l’as fait !
Oui. Et pas qu’un peu.
J’ai fait ce que le travail nous pousse si bien à faire : l’hypocrite.
J’ai voulu, moi aussi, faire « ce qu’il fallait », mais « avec originalité ». Et je doute très fortement de l’avoir été. Et je me suis vraiment forcée à le faire.
Je crois que le seul marronnier que j’ai fait avec plaisir a été la nouvelle horrifique sur les SEO et le tueur en série de Google à l’occasion d’Halloween… Mais sinon, non : globalement, c’est chiant, et j’en ai marre de faire des trucs chiants.
Voilà pourquoi à moins qu’un marronnier ne m’inspire, je ne prendrai plus la plume ici.
Attends, mais tu postes pas ça le 2 janvier justement ?
Mais dis-donc, c’est que t’es attentif, en plus !
Si. Parce que je trouve ça très drôle de vous faire cliquer sur un billet qui se contredit dès le titre…
Yop,
J’en vais de ma participation pour donner mon point de vue sur la question tiens. Puisqu’elle me fait penser à quelque chose de plus large. Je ne pense pas qu’il faille se poser la question de s’il faut poster ou non en Janvier.
Pour caricaturer :
1) Vouloir poster en Janvier = Mouton
2) Vouloir NE PAS poster en Janvier = Anti-système
3) Ne pas faire attention à la date = Hors système.
A noter qu’on peut retrouver ces 3 cycles de manière chronologique dans toute quête de maturité. Au début on se dit qu’il faut suivre, on le fait d’instinct, ensuite on se rebelle et on s’oppose à tout puis on arrive au point ou nos décisions ne sont pas influencer par les autres dans un sens ou dans un autre.
On peut retrouver ce cycle partout :
1) Enfant -> Parents = Dieux -> Toujours raison
2) Ados -> Parents = Diable (crise d’ado) -> Ils disent de la merde
3) Adule -> Parents = Humains. Je réfléchis à leurs message tout en restant critique.
On peut retrouver ce cycle aussi avec les média :
1) TF1 = La vérité incontestable
2) TF1 = Bullshit à la solde des illuminatis réptiliens qui contrôlent le monde.
3) Esprit critique
Sinon, je viens de voir ton petit bloc descriptions et j’ai envie de te dire : Quand tu veux, je te fumes à SC, lâches ton id >.< !
PS : Au cas ou, ne va pas croire que je sous entends que tu es une ado attardée complotiste hein, ça m'a juste fait pensé à tout ça à la fois !
Puis sur ce sujet précis, j'imagine que beaucoup de paramètres entrent en ligne de compte en terme de trafic, d'enjeux pécuniers dont on a pas forcément conscience selon l'objectif du blog de chacun.
Salut !
Tiens, j’crois que c’est la première fois que je te vois ici (ou alors, depuis longtemps ^^).
T’en fais pas pour le « sous entendu », j’ai bien compris. Et si c’était le cas, ça ne serait pas bien grave, d’autant que ce n’était pas mon propos en fait.
Mais sinon, oui, c’est très vrai : l’anti-système est par essence assez conformiste à force d’être ce qu’il est, et surtout de rechercher des gens qui lui ressemblent. Pour se donner une légitimité, une force, se rassurer aussi… C’est globalement un instinct grégaire (tiens donc… 😉 ) assez naturel.
C’est ce qui m’intéressait dans l’idée que l’on réutilise volontairement des codes réels dans ce multivers virtuel. Et effectivement, cela répond autant à des normes, qu’à des besoins commerciaux (je pense).
Cela dit, je maintiens qu’il peut être très utile de faire l’inverse. A titre personnel, j’avais évité de parler de la refonde de PressEnter pendant la rentrée de septembre, et là encore en janvier, je vais retarder la sortie d’un projet qui me tient particulièrement à coeur.
Pas par anti-conformisme, je pense que j’ai assez expliqué qu’on ne peut être réellement novateur. Non, mais par stratégie. Je pense que ça sera « plus efficace », si j’attends que tout le monde ait dit ce qu’il avait à dire. Sans parler du fait que mon projet est anachronique finalement avec la salve de textes actuels. Du coup, je pense qu’il ne se verrait pas du tout.
J’aimerais bien savoir si d’autres personnes jouent à ça, tiens…
Pour SC : je jouais (et joue parfois encore rarement) au premier et Broodwar. Cela dit, c’est très probable, les jeux de strat, bien que j’aime ça, ne sont pas du tout ma « spécialité » ^^
Parce que le web est silencieux le reste du temps ?
Ça m’avait pas frappé.
Mauvaise langue : en comparaison, presque.