Un truc que j’adore dans le milieu du Web/Com’, et qui est largement exacerbé dès lors qu’on touche à de l’entrepreneuriat, c’est que tout le monde est passionné. Mais genre « passionné à donf de l’Amazing, u know ? » Vous n’avez jamais remarqué à quel point les profils sont les mêmes ?
Les mêmes platitudes, les mêmes parcours, les mêmes éléments de langage, les mêmes passions.
Un jour, ya un gars un peu dans le vent qui t’as pondu sa fiche-produit (comprendre le storytelling en guise de CV), et on a tous fait la même chose. En disant les mêmes choses.
Un jour, t’as un con qui a balancé cette absurdité navrante qui vous fait tous bander : « Je suis passionné de passion. »
Et depuis… Les CV et autres « présentations » racontent les mêmes histoires, en se croyant super intelligents et novateurs, en plus.
L’archétype que je ne supporte pas dans mon métier
« Oh /ouin Camille elle râle encore, mais elle fait que ça, sérieux ?! » Oui. T’adores ça en plus, ma caille.
Dans mon métier, disais-je, on se la raconte beaucoup. Normal, on est plus ou moins un condensé d’auteurs et journalistes ratés sur le retour (d’égos frustrés, donc), tentant de grapiller deux sous en s’imaginant qu’être payés pour écrire nous rapproche de notre saint-graal. Enfin, ça, c’est vrai pour les « vrais passionnés ». Et ça concerne, aller quoi… 20% du biz ? J’en sais rien, mais j’pense qu’on est peu nombreux.
Non, en fait, l’archétype, c’est celui du Rédac’ (homme ou femme), qui t’explique que :
- A toujours été passionné par le Web
- Depuis toujours d’ailleurs
- Surtout depuis qu’il/elle a découvert Facebook en fait
- Parce qu’avant c’était les forums, et les forums, c’est caca, c’est trop geek
- Mais est geek quand même
- Parce que ça a un Iphone
- Et que même ça « geek » sur Snapchat
- Et que donc le Web c’est sa passion qu’on te dit
- Pis la Rédaction Web aussi
- Dont il/elle en a entendu parler au détour d’un cours en école privée
- Ou en cherchant sur le Net « comment se faire des thunes en se grattant les couilles »
- Ou encore « Être maman et entrepreneure c’est possible ! » (Oui, parce que c’est très genré le Web, tmtc)
- Donc la Rédaction Web c’est sa passion
- Les balises title, les chapô et tout et tout
- Pis le SEO aussi ! Vachement passionnant le SEO
- Surtout quand ça se limite à deux/trois mots clés
- Et que ça adore aussi la Communication
- Parce que communiquer, c’est important tu vois ?
- Et que donc c’était une vocation son métier
- Hi hi hi
Dans mon métier, on entend beaucoup de mots anglais, beaucoup le mot passion, beaucoup le mythe de la vocation « depuis tout petit » (en total anachronisme avec l’apparition des différentes technos et professions…) ; bref, dans mon métier, ça raconte pas mal de la merde, avec un grand sourire. Dans le vôtre aussi, je n’en doute pas.
Pourquoi je ne supporte pas ça ?
Parce que c’est débile, déjà. Que c’est commun, ensuite. Et parce que c’est faux.
« Stupidité basique et mensongère », voilà le wombo-combo de base qui me tire, au mieux, un rictus condescendant, au pire, un billet comme t’aimes.
J’aime pas, parce que c’est profondément con, que ça dessert le métier (qui est bien plus noble que ceux qui n’y comprennent rien tentent de te cracher en 350 mots), et ça dessert aussi la personne qui le dit.
J’dis pas qu’il est impossible d’être passionné de son métier. J’dis juste qu’il faut arrêter de prendre les gens pour des cons : la Rédaction Web, c’est pas une passion. On le sait. Et vous savez comment je peux affirmer une telle chose ? Simple : si c’était le cas, il y aurait moins de merde d’écrite sur le Web.
Personne n’y croit à cette histoire de passion, à commencer par le pauvre glandu qui te raconte ça sur son profil Linkedin, en croyant que s’il y ajoute un smiley, il fera preuve de « touche personnelle ».
Arrêtez de mentir
Soyez francs putain : vous êtes là pour le pognon, parce que c’est facile de trouver du taff quand on joue les machines à écrire. Vous êtes là parce qu’il y a 10% de chômage, que ça permet de bosser en calebut’, et que, même si vous êtes obligés de faire du 50h/semaine pour être payés la moitié d’un SMIC (fallait pas vous brader, hé hé), vous vous sentez plus libres qu’avec un patron.
Ce qui est faux. Aussi faux que votre CV et prétendue passion pour les fiches-produits.
PERSONNE ne se réveille un jour en se disant « Tiens, je vais écrire des étiquettes jamais lues par les internautes, pour vanter les mérites d’un truc qui a de fortes chances d’être en plus de la merde. ». Alors parle pas de passion, ça me fout la virgule à l’envers.
Mais alors, pourquoi un tel mensonge ?
J’pourrais vous faire des heures pour vous expliquer que ça tient surtout à la médiocrité de la masse, mais on va encore dire que je suis une vraie conasse. Et puis balancer des évidences, c’est épuisant à force, et la moitié d’entre vous n’est pas capable de les comprendre.
Mais je pense qu’il y a une vraie raison sociétale et professionnelle à ça. Et que petit à petit, on s’enferme dans une logique bancale de mensonges et de storytelling à tout va.
Je n’en parlerai pas maintenant. Parce que ça fait longtemps que je vous tiens la jambe, et que j’aime bien l’idée de bien distinguer les deux : aujourd’hui on ricane des glandus-passionnés-de-passion, et plus tard on réfléchira.
Mais non, ça ne sera pas si terrible, vous verrez… Clique-ici si tu m’crois pas.
Au fait, t’as dit que t’étais passionnée de quoi, au juste ?
Alors, pour ceux qui fantasment encore à l’idée de « se payer la petite rédactrice » (et qui n’osent de toute évidence pas…), je vous renvoie à ma présentation, où je parle d’écriture.
Et oh… Mais que vois-je ? Ne serait-ce pas ici un site dédié à l’écriture ? Oh ? Mais que dis-tu petite apostrophe ? Mais oui, mais c’est bon sang bien sûr : Mais c’est qu’elle écrit vraiment à côté, pas juste elle le dit.
Et vous savez comment je peux me payer ce luxe ? En ne vous mentant pas : j’aime écrire. Et je TRAVAILLE en Rédaction Web pour me payer ce plaisir.
Je ne mens pas, parce que c’est inutile.
Il n’y a pas de honte à vous dire que oui, si j’avais les moyens, je ne serais pas Rédactrice, mais qu’en attendant, je suis bien contente d’aimer mon métier quand même. Quand même.
[…] de goût pour la perfection stylistique, de fureur d’écrire. Cela me fait toujours penser à ce superbe édito coup de gueule de Camille Gillet qui rappelle que c’est un métier, pas un loisir, et que je préfère quelqu’un qui assure la […]
Bien dit ! Merci pour cette franchise non dissimulée. Si j’avais des couilles, je me viderais aussi… En attendant, j’essaie déjà de me faire une place, pour le reste on verra plus tard. Bonne continuation en tout cas 🙂
Salomé
Merci beaucoup et ça viendra vite. De toute façon, il n’y a pas besoin d’avoir une place pour avoir une opinion 😀
[…] de goût pour la perfection stylistique, de fureur d’écrire. Cela me fait toujours penser à ce superbe édito coup de gueule de Camille Gillet qui rappelle que c’est un métier, pas un loisir, et que je préfère quelqu’un qui assure la […]
[…] de goût pour la perfection stylistique, de fureur d’écrire. Cela me fait toujours penser à ce superbe édito coup de gueule de Camille Gillet qui rappelle que c’est un métier, pas un loisir, et que je préfère quelqu’un qui assure la […]
[…] de goût pour la perfection stylistique, de fureur d’écrire. Cela me fait toujours penser à ce superbe édito coup de gueule de Camille Gillet qui rappelle que c’est un métier, pas un loisir, et que je préfère quelqu’un qui assure la […]