« Je ne sais pas me vendre. » Tu te dis ça, je me dis ça, ils ou elles se disent ça. Je ne compte plus le nombre de personnes qui acceptent l’idée de ne pas savoir se vendre comme une fatalité, parfois même comme un vernis moral d’une certaine humilité.
Je ne les compte plus, et je commence à en avoir plein le cul de les voir. Pourquoi ? Parce que dans mon métier, ne pas savoir se vendre est impardonnable. Surtout quand derrière ça prétend pouvoir vendre les autres.
T’as entendu parler du « copywriting » ? Peut-être même que tu marques partout sur tes sites que tu sais faire… ? Mais le sais-tu ?
Le moment où je te donne la définition du copywriting pour remplir l’article
Et c’est généralement le moment où je te démontre que je n’ai aucune idée de ce que c’est. Je dis « je », mais j’te rassure : c’est aussi toi quand tu grattes ton bredouillage hebdomadaire pour remplir ton blog.
En théorie, le copywriting c’est l’art de faire vendre avec des mots.
En pratique, ça va de savoir ne pas trop être pathétique quand tu cherches à te légitimer (et à empocher un peu de flouze) à être le/la caïd de la formulation. En marketing, un génie de copywriting (un « créa ») va être responsable de punchlines si puissantes qu’elles en deviennent iconiques et qu’entre eux, les créas sont capables de te citer l’agence et le nom de l’artiste derrière. Ouais, comme face à un Picasso.
« C’est fort en chocolat », « Parce que vous le valez bien », « Un coup de barre ? Mars, et ça repart »
Mais pour le commun, nous sommes très loin de ce sens du verbe. « Vous, moi, surtout moi », nous nous prenons pour Neil Patel quand on met un call-to-action avant la ligne de flottaison…
Comment j’ai arrêté de commettre cette terrible erreur
Nous ne sommes pas dans une société qui nous aide à vendre avec intelligence. Il est temps de le dire. On voit passer tous les jours des articles nous disant qu’on est une société de merde poussant à consommer de la merde, et qu’on est tous très cons, mais est-ce que ça change quelque chose ? Non.
Non, parce qu’on continue d’avoir des publicités avec des meufs à moitié à poil pour des bagnoles, des gros tambours pour vendre des déodorants à l’acier-de-la-menthe-de-la-force-brute-de-la-nature à des mecs, et toujours le message simple :
« Consommer, c’est se libérer. Regarde toutes les dictatures dans le monde, profite de ta liberté, jouis de la liberté, consomme. Libère-toi par le paiement sans contact. Sans contact, sans entrave, libéré, Deliveroo ».
Alors forcément, quand on voit que faire le coup de la ménagère de -50 followers marche encore, pourquoi se casser le cul à être inventif, créatif, ou pire : à vendre sans prendre le consommateur pour ce qu’il est ?
Sauf que c’est ça la différence entre un bon copywriteur et un mauvais.
- Le mauvais copywriteur sait que la cible est débile, il fait sa punchline en fonction, et il vend aux plus cons d’entre eux.
- Le bon copywriter sait que sa cible est débile, mais il la traite comme si ça n’était pas le cas. Son verbe est un brin artistique, histoire de donner un vernis d’intelligence. Ça raconte un truc qui ne parle pas du quotidien de la ménagère. Pas en ces termes. Les plus orgueilleux achètent. Et pas qu’un peu.
Pourquoi vous n’arrivez pas à vous vendre
Parce que vous croyez que vous méritez mieux que vos mots ridicules et vos formules de merde. Vous croyez que ce que vous êtes, que votre produit, est de bien meilleure facture que votre sens de la promo.
C’est même probablement vrai, et je vous le souhaite.
Mais ça n’a rien à voir avec de la modestie, arrêtez la modestie, me la faites pas, putain ! Vous étiez encore en train d’emmerder votre réseau avec les dernières photos de vos vacances ou votre dernier entretien « inspirant de la startupitude ». Vous n’êtes pas modestes. Je ne le suis pas. C’est pour ça qu’on fait ce métier.
Vous n’arrivez pas à vous vendre parce que vous pensez que vous méritez de plus belles pages de vente que celles dont vous croyez être capables. Sauf que vous les faites toujours aussi connes… Parce que vous croyez que c’est comme ça qu’on fait. Et que vous n’osez pas aller au bout de votre orgueil. Vous n’osez pas vanter réellement vos mérites.
D’ailleurs, vous ne savez pas vendre les autres non plus
Et me cherche pas d’excuse, parce que tmtc que j’ai raison. Arrête un peu avec le « hi hi hi, c’est marrant, quand il s’agit de quelqu’un d’autre, je sais… » Non tu sais pas. Tant que t’auras pas été foutu d’assumer ton orgueil, de le dépasser, de le magnifier pour nous chier la belle page produit de toi-même tu ne sauras jamais, jamais, JAMAIS faire ça correctement pour quelqu’un.
Tu feras semblant. Et le client, il a beau être con, il est comme un(e) amant(e) il sent un minimum quand on simule.
Savoir (se) vendre, c’est arrêter de faire de la merde
Ça a l’air fou comme ça, hein ? Dire qu’on en est encore à raconter qu’il faut foutre de l’humain, de l’IA, de l’UX… On dirait des additifs de produits sous vide. Genre « E414, E785 ». Et spoiler : ça a le même goût. De la merde.
Bon et concrètement ? Relisez-vous, putain. Quand ta phrase fait : « Je vends des prestations de qualité nées d’une réelle expertise et sens du service », arrête tout, c’est de la merde !
Tu vas vendre des prestations pourries que tu tires de ton chapeau en en ayant rien à battre de ton client peut-être ? Tu vas écrire des articles sans avoir fait de recherche ? Sans respecter les standards du Web ? Tu vas choper des images volées qui ne correspondront jamais à la thématique ? Est-ce que tu vas écrire des conneries dans ses textes, voire en recopiant ?
Non ? Ah, tu m’as fait peur… J’ai cru à un moment qu’il te fallait expliquer que t’allais bien faire ton taff…
Sans déconner, Sherlock. Tu crois vraiment que ton client est débile à ce point ? Oui, il l’est. Mais qu’est-ce qu’on a dit ? Qu’on ne lui montre pas qu’on sait ! Donc ?
Savoir (se) vendre, c’est vendre le client à lui-même
Ne lui dis pas que tu vas bien travailler. N’écris plus des évidences qui me font lever les yeux au ciel. T’as l’air d’un(e) gamin(e) en train de justifier sa place chez les grands. Vends putain ! Vends pas ton produit, vends la trique que va se taper ton client en achetant.
Ton produit n’est pas légitime. Ton produit est génial. C’est un fait. Et il va rendre ton client, ou le client de ton client aussi génial que toi.
« Parce que je le vaux bien »
Tu crois que L’Oréal te dit que tu vaux vraiment quelque chose qui coûte inutilement un bras ? Que tu vaux vraiment « toute l’expertise et le savoir-faire de cette maison de prestige » ?
Nan… Le « Je » c’est L’Oréal. C’est « Je vaux bien la quantité de thunes que tu me donnes ». Mais le génie consiste à te faire croire qu’on parle de toi, pas de la marque…
Donc, deviens génial.
Merci Camille, bonne journée!
De rien 😀
C’est bon ça ! Merci Camille.
Et puis il ne suffit pas d’écrire « No Bullshit », il faut le faire et pour de bon !
Plein le cul d’en avoir plein le cul.
Soit « on » est médiocres, soit « on » se la joue trop bons…
Où est le travail remis 100 fois sur le métier ?
Où est le ton unique ? L’anti politiquement correct qui pour une fois ne pue pas l’arnaque ?
Où sont l’originalité, la sueur, les fautes pardonnées, la rédemption ?
Il y en a ici, made my day.
Merci à toi Stéphane !
C’est la somme d’hésitation, d’excuses, de doutes et souvent d’échecs qui m’ont fait réfléchir à ce qui coince. Quand je relis certaines de mes phrases, quand je réécoute certaines de mes excuses. Se vendre, c’est plus s’accepter enfin que de se la péter.
Ca peut être utile de s’auto-persuader en surjouant, mais ça ne marche jamais totalement.
Et je ne sais toujours pas copywriter 😀
j’adore me faire engueuler dans tes articles… je suis maso tu crois ?
Ah-ah, oui, clairement 🙂