Note : Pour comprendre ce texte, il faut avoir lu « Lettre à l’influenceur » de 4h18.
Ca fait prétentieux à mort que de te répondre via blogs interposés. Mais on est des bloggeurs, oui ou non ? Alors j’te propose ici le début d’une conversation publique (tu sais comme j’aime m’étendre en public :p ), et j’invite tout le monde à participer.
Ce billet donc, cher 4h18, tu le construis sur une série de questions, manifestement en « réaction à », et tu le classes dans « délit d’opinion » la catégorie sur ton blog qui n’engage que toi. Et pourtant, à mon sens, ce manifeste de la pensée numérique mérite bel et bien de figurer dans ton guide Twitter #TweetMeUP. Pourquoi ? Parce que tu poses les bonnes questions. Tu pointes du doigt les vraies problématiques, et tu snipes les « masturbations numériques ».
En plusieurs points – que j’ai moi-même sélectionnés comme une grande – tu reviens sur la question de l’influence sur le Web et de ce qu’est le vrai « faiseur de tendances #CMoaKiaRészonFollowMe ».
Point 1 : L’influenceur qui se contente de faire des vaguelettes dans sa timeline
« La plupart de nos « influenceurs » ne sont que de « simples relais » d’une information qu’ils n’ont pas écrits. Jusqu’à quel point sont-ils en phase avec les informations qu’ils rediffusent ? Qu’en pensent-ils vraiment ? Allez savoir ! La plupart d’entre eux ne commentant jamais, ô grand jamais. »
L’idée la plus importante que tu émets dans ce billet est la suivante : L’influenceur, est avant-tout un zapping/zappeur. Il se pose sur Twitter (ou le Net en général) comme simple « sélectionneur des meilleurs extraits du Web ». Il RT en masse, expliquant que CA, c’est à lire, et s’arrête ici.
A ce stade de ton écriture, on comprend directement que l’influenceur n’est rien d’autre qu’un marketeux, qu’un agent de la pensée des autres.
Avec sarcasme, tu lui reproches de ne pas se mouiller. Est-ce un avis personnel, ou un triste constat ? C’est bon, bas les avatars stylisés, on sait tous que c’est la réalité. On sait tous qu’ici, tu donnes un gros coup d’pied dans la fourmilière des followers en tentant de pousser l’influenceur à le devenir pleinement. En redéfinissant ce gros « zozio bleu », avec sa véritable signification, tu amorces ici une réflexion profonde sur le partage sur le Web et l’art d’exister par ses opinions. Car tu poursuis par ceci :
« Il faut comprendre notre « influenceur » : donner son avis, son opinion, représente un vrai danger pour sa carrière. »
Et c’est là que j’arrête de te lustrer l’écran plasma, et que je rentre dans la question qui m’intéresse : POURQUOI ? Ce que tu dis est une vérité que l’on constate tous. Le Web, la Comm’ en général demande une auto-censure qui ferait pâlir de jalousie la Police de la Pensée. On le sait, on le voit. Plus un quidam monte en « popularité », plus sa parole est auto-filtrée pour ne fâcher personne.
Dans le Web, dans la Politique, dans l’Art : tous les grands de ce monde finissent par dire un jour ou l’autre : « Je ne souhaite pas blesser/heurter, telle ou telle sensibilité ».
Ok, mais pourquoi l’influenceur a-t-il peur de son opinion ? Pourquoi croit-il que la parole est dangereuse au prorata de son nombre de followers ? Est-ce que c’est une impression de sa part ? Ou est-ce que le milieu dans lequel il évolue a tendance à mettre en danger toute personne un peu trop bavarde ?
Mon opinion : Je crois sincèrement que la faute incombe à l’influenceur ET aux influencés. Il est communément admis que la vérité se passe d’opinion. Prenons l’exemple du journalisme. Aujourd’hui, très peu de journalistes osent écrire en émettant un avis sur des faits. Parce qu’on leur apprend que la seule bonne façon de relayer l’information est de le faire en totale neutralité. Mais est-ce qu’on ne confond pas un peu les notions ici ? Est-ce qu’on ne confond pas « Vérité » et « Avis » ? Est-ce qu’un fait change sous-prétexte que la personne qui le relaie ose proposer son analyse ?
Je ne le pense pas. Si le média a l’honnêteté de dire : « voici les faits, maintenant, voici mon analyse », il informe son lecteur/influencé de son intention de ne pas se cantonner au bête « copié/collé » des données.
Le problème est que la norme impose l’uniformité. La norme est avide de lisse. Et une opinion, par définition est rugueuse. Beaucoup trop aux yeux de cette norme étouffante.
L’opinion semble dangereuse. Parce qu’elle fait prendre des risques à la personne qui l’émet. Le risque que l’interlocuteur d’en face ne soit pas d’accord. Le risque de heurter les convictions/sensibilités de chacun, mais surtout : Le risque de se dévoiler soi-même.
Alors comment l’influenceur influence s’il ne propose aucune tendance ? Justement, tu coupes court à tout mythe…
Point 2 : Avant de faire la mode, faut la porter coco
…Et tu ne le fais pas à moitié. Tu n’as pas peur de heurter les convictions de l’influenceur. Non, tu le déconstruis totalement même. Et très simplement, en affirmant ceci :
« Un influenceur qui n’a rien à dire, c’est tout, sauf un influenceur »
Je suis on ne peut plus d’accord (ça commence à se voir, je crois), et j’aimerais y apporter ma contribution.
« Influencer » veut dire quoi ? Très synthétiquement, le Larousse explique que c’est la capacité de quelqu’un/quelque chose à influencer, à agir, sur le cours des événements, ou sur l’attitude de personnes, ou groupes de personnes. En d’autres termes, l’influenceur est celui qui va valider/invalider les faits, les tendances, les opinions. Celui qui va « changer son monde » pour reprendre ton expression.
Peut-on changer le monde en diffusant la pensée d’autrui ? Oui, dans une certaine mesure. Et c’est là où l’influenceur a un maigre impact. En effet, fort de son autorité numérique, il adoube les idées des autres. Ce qui fait de lui un « faiseur d’influenceurs ». Mais, et je reprends ma précédente expression : il n’en est pas moins qu’un « agent de la pensée des autres ». Et cette forme de maigre influence est bien plus dangereuse pour l’influenceur que d’oser exprimer sa personnalité. Tu le signales par ceci :
« Relayer des articles sur un domaine précis ne fait pas l’expert. Il faudrait que chacun s’exprime sur un blog et délivre sa compétence sur son sujet de prédilection. »
En gros, et c’est l’analyse que je fais de ton billet. Tu tentes d’attirer l’attention de l’influenceur sur le réel danger qui le guette. Car, en se contentant de RT les propos des autres, notre influenceur semble dire implicitement qu’il est incapable de produire quoi que se soit.
ET LA, notre influenceur, s’il réfléchit cinq minutes, comprend qu’il est bien plus dangereux de ne pas oser émettre un avis, que de le crier sur tous les toits. Il comprend alors qu’en restant dans l’ombre du « Politiquement correct », il se place lui-même en position de faiblesse. Il démontre qu’il ne produit rien. Qu’il ne propose rien. Et, n’ayons pas peur des mots : Qu’il n’influence sur rien du tout !
Ici, 4h18, tu dis à tout le monde que suivre bêtement les gens et être en permanence en accord avec leurs idées, ce n’est pas se poser en critique. Car la critique nécessite l’opinion. Ici, tu amorces une petite révolution de la pensée numérique en sommant l’influenceur et l’influencé de se bouger les pixels et d’oser créer, d’oser s’interroger. D’oser prendre le risque de se tromper.
Point 3 : De l’importance de se découvrir par friction avec les autres
Je vais citer trois passages de ton billet qui, je trouve, se suivent et construisent à eux-seuls la réflexion sur l’échange :
- « Actuellement, en France, ouvrir un débat contradictoire revient à être catalogué « bad buzz » »
- « Tu me conseilles donc d’appliquer des conseils que tu ne saurais pas t’appliquer à toi-même ? Faites ce que je dis, pas ce que je fais ? Et je devrais donc t’accorder ma confiance ? Parce que les autres te suivent ? Dis-moi « influenceur », j’ai l’air si con que ça ?? »
- « C’est dans ces échanges que je puise une réflexion, des idées, c’est aussi ce qui me pousse à la remise en question. »
Tu pars du constat triste suivant : la norme n’admet pas la différence. La différence est nécessairement négative. Donc, l’influenceur va dire qu’il faut être différent, car c’est vendeur, mais ne le fera pas car la norme l’étouffe ; mais toi, tu redores la notion de discussion, en montrant que c’est elle qui permet la réflexion.
4H18, tu réfutes l’uniformité, le silence intellectuel, et l’hypocrisie que tu pointes chez l’influenceur. Et tu démontres ici ce que c’est que d’influencer réellement. Comment ? Mis à part le fait que l’on va croire à force que j’ai un autel à ta gloire dans mon bureau, je suis en train de commenter ton billet. Je n’arrête pas de dire : « Je suis d’accord, parce que ». De dire « Ca, c’est brillant, précis, et juste ».
En posant une opinion sur la façon dont les influenceurs n’influencent plus, tu ouvres un débat contradictoire, un « bad buzz », tu fais « le troll » diraient même certains. Tu changes ton monde. Parce que tu poses des questions, tu accuses. Et moi, j’y réponds. J’acquiesce, et je démontre que tu m’influence grâce à tes opinions.
Ce qui relève du génie dans ce billet d’humeur, Dix-huit, c’est que tu ne te contentes pas du tout de pointer du doigt un dysfonctionnement. Tu mets en pratique ce que tu dis, et donnes une leçon, par écrit, de « comment tu penses qu’il faudrait faire », en le faisant directement au travers de ton blog.
[…] « Lettre à l'influenceur » de 4h18, ça taille ou ça questionne ? – PressEnter. Note : Pour comprendre ce texte, il faut avoir lu « Lettre à l’influenceur » de 4h18. Ca fait prétentieux à mort que de te répondre via blogs interposés. Mais on est des bloggeurs, oui ou non ? Alors j’te propose ici le début d’une conversation publique (tu sais comme j’aime m’étendre en public :p ), et j’invite tout le monde à participer. Ce billet donc, cher 4h18, tu le construis sur une série de questions, manifestement en « réaction à », et tu le classes dans « délit d’opinion » la catégorie sur ton blog qui n’engage que toi. […]