En bon citoyen éclairé, vous ne pouvez pas avoir manqué cette information : devant les problèmes que rencontre son pays, et dans l’incapacité totale de faire changer les choses, Emmanuel Macron, Ministre de l’Economie vient de créer un nouveau mouvement politique. Si sur Twitter and co, de nombreuses personnes attentives ont su souligner le fait que notre bon Ministre a déjà les cartes en main pour faire « marcher son pays », il manque une analyse du site et du mouvement.
Comme toujours, du haut de mon ignorance politique zé économique, au travers du prisme si particulier du simple citoyen, je reviens sur ce « En marche ! » qui, bien qu’il semble amusant, en dit long sur l’état de la Politique, et sur les ambitions de ce jeune Ministre. Attention les loulous, cette analyse est longue, et elle n’est pas pour les mous du gland-démocratique. Parce qu’aujourd’hui, on décortique !
Un nom de mouvement qui annonce directement la couleur
Et elle n’est ni rose, ni bleue. Nous sommes loin des questions « droite/gauche », nous sommes loin des questions politiques, loin des idéologies, et encore plus loin des idées. Avec « En marche ! », nous entrons dans le parti 2.0, celui qui te culpabilise avant même d’accéder au pouvoir, celui qui ne se cache pas de te vendre un produit, de te vendre, toi. Oui, mon ami, aujourd’hui, tu es le produit. Concentrons-nous sur le nom :
« En marche ! » sous-entend qu’avant son existence, nous sommes dans l’immobilité la plus totale.
Pis, en prenant en otage cette action, le mouvement nous habitue à l’idée qu’il serait le seul détenteur d’un possible changement tant demandé par les français. Argument facile ? Absolument pas, réfléchissez bien à la construction des noms des partis « Socialiste » et « Les Républicains »… Hum ? En fait, toute la communication repose sur ce nom. Emmanuel Macron nous propose une communication d’entreprise. Du pur Copywriting pour son site, et un vrai matraquage markété pour son spot.
[Note : Une lectrice attentive et avisée m’a fait cette réflexion : « En Marche » et « Emmanuel Macron » ont les mêmes initiales. Je vous laisse méditer, et je la remercie encore !]
Et si vous remettiez la France #EnMarche ?https://t.co/iO4fRfQYwj pic.twitter.com/7uWh4MPhn5
— En Marche (@enmarchefr) 6 avril 2016
Ce tweet, qui doit ne faire rire que ceux qui pensent encore qu’une raie sur le côté est de bon goût, est formulé de la même manière que ceux de mes « collègues » du Web-digi-marketing. C’est-à-dire « la fausse formulation à la cool qui tente de te vendre un produit ». Vous connaissez beaucoup d’hommes/femmes politiques communicant sur ce canal, à ce point ? Voilà, donc habituez-vous, c’est loin d’être fini.
Un site fait dans la précipitation ?
C’est la question que je me pose. Quand on va sur en-marche.fr, on se fait rediriger, et l’on a que peu de choix. Outre la vidéo (que l’on traitera plus tard), on a une série de liens. Avant même de s’intéresser aux ancres de ces liens (le texte), je note que quand on passe la souris dessus, l’url ne fait pas rêver… #/0/1 ou encore #/0/11… Bref, d’un œil de néophyte, ça fait « codé viteuf en urgence ». Toujours avec mes petits moyens, et par curiosité, je me renseigne sur le nom de domaine et sa création, et je note : les infos sont protégées par Gandi, mais le ndd est déposé depuis le 07 janvier 2016.
A ce stade, mes questions sont : Depuis quand Macron a cette idée en tête ? Pour quelle(s) raison(s) cela sort maintenant ? Devait-il sortir plus tard ? Y a-t-il un élément déclencheur pour ce mouvement ?
Revenons sur le site. Donc, nous arrivons. Sur notre onglet, on voit qu’il y a une favicon. Pas n’importe laquelle, c’est un point d’exclamation. Nous sommes toujours en pleine communication active, voire d’urgence. Et je vais insister sur ce point car, les seuls textes présents sur ce qui sert de page d’accueil (notons « parcours ») nous pressent de prendre une décision.
Quel français es-tu ?
C’est un peu ce que cette page d’accueil nous demande. « Quel français es-tu ? » Es-tu de ceux qui ne foutent rien et sont responsables de tous nos problèmes (en marge des immigrés, et des chômeurs, of course) ? Ou fais-tu partie de ceux qui aiment leur pays et veulent le voir se redresser ?
Avant même de nous expliquer le pourquoi du comment de ce mouvement. Avant même de nous dire qui se cache derrière (pour ceux qui ne seraient pas arrivés dessus via le tweet de Macron, ou via un journal), cette page nous propose en premier d’adhérer. Ensuite, elle nous propose trois solutions :
- Je marche (notons le jeu de mots)
- Je reste assis sans rien faire
- Je marche déjà
Traduction :
- J’en suis !
- Je suis une pauvre merde qui participe au problème
- Je suis un des sauveurs de la France
Non. Non, je n’exagère pas. Oui, c’est ce que cette formulation veut dire. Oui, c’est de la communication agressive. Oui, c’est du marketing. N’importe quel markéteux, vendeur de rêves, ce que vous voulez, use et abuse de cette technique : vous poser une question à laquelle vous ne pouvez répondre « non ».
Une sorte de « Veux-tu gagner de l’argent ? » ou encore « Veux-tu être heureux ? »
Ici, c’est plus subtil, mais cela pourrait se traduire soit par : « Veux-tu sortir ton pays de la merde ? » ou, et j’ai une préférence pour cette interprétation : « Fais-tu partie du problème, ou de la solution ? »
Les amateurs de manipulation apprécieront 🙂
J’adhère à quoi au juste ? La question sans réponse
Premier lien « J’adhère ». On arrive enfin à une page dont le title est « Vos notifications – En marche ! » (non, moi non plus je ne comprends pas ce title…), et on a un menu. Il était temps ! Ce menu semble nous proposer un large choix expliquant (peut-être ?) l’origine de ce mouvement… Après tout, nous avons « En marche », « Emmanuel Macron », « Ça nous fait marcher », et enfin « Suivez En Marche ». Au survol de la souris, ces liens pointent vers des pages particulières. A ce stade, je n’ai pas adhéré… Et je me suis amusée à cliquer sur ces liens. Ils me renvoient tous à la « page d’accueil ».
N’aurais-je donc pas le droit de savoir ce que c’est, avant de dire « oui » ?
Non. A l’instar du marketing à l’américaine, il faut « souscrire à la newsletter » pour accéder au contenu-exclusif-gratuit-qui-va-changer-ta-vie.
Je peux vous dire, les enfants, qu’en tant que citoyenne-tout-ça, je n’apprécie pas vraiment qu’on me parle Politique sur ce ton. Mais ce n’est pas grave, continuons notre voyage :
- On me dit que le mouvement se veut « ouvert à tous, sans exception ». Je réponds que c’est grave qu’on soit obligé de le préciser.
- On me sort ensuite un déroulé de points qui me vend ce que je vais gagner en adhérant, puis, j’ai un appel à l’action, puis j’ai le droit au résumé de la charte, puis, la possibilité de la télécharger en intégralité (elle n’en dit pas plus sur le but du bousin).
- Ensuite, j’ai le formulaire d’inscription, qui comporte mes infos légales, plus une tentative d’établissement de profil (mes centres d’intérêts). Je coche la case « je suis ok bla bla bla », et j’envoie le formulaire.
- Enfin, en tout petit, les mentions légales.
[Note :J’ai voulu vous proposer une capture d’écran de sites « type vendeur de rêves », mais tous ont tendance à expliquer leur business un minimum. Je n’ai donc pas d’exemple aussi frappant, mais je vous invite à taper « gagner de l’argent facile » sur Google, vous verrez que Macron n’est définitivement pas un Politique…]
Quand un site web est construit comme un argumentaire commercial…
Très bien, avant de remplir ce satané formulaire, je vais visiter le site, sans adhérer. Retour à la case départ, cliquons sur « Je marche ».
J’arrive sur une autre page qui m’exhorte à l’adhésion. Toujours aucune explication. J’ai le son de la vidéo qui se manifeste, mais pas la vidéo. C’est vraiment n’importe quoi ce site… Hop, on me propose de remplir le formulaire à la mano ou… En m’inscrivant avec Facebook. BEN TIENS ! Et l’en-tête de la page, il me dit quoi ?
« Merci, pour découvrir En Marche, laissez-nous vos coordonnées : »
Dis donc, Emmanuel, tu connaîtrais pas le markéteur français, par hasard… ?
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Je clique sur « Je reste assis sans rien faire », et j’arrive sur une nouvelle page, avec ENCORE le son de la vidéo, sans vidéo. Mais cette fois-ci, mon navigateur (Chrome), me déroule un argumentaire édifiant…
On nous dit que c’est « notre droit… MAIS », on nous propose « quelques faits ». Ce qui est amusant, c’est qu’on nous en propose qu’un seul, en réalité, avant de nous sommer une nouvelle fois d’adhérer. En fait, j’ai testé un truc : le fait (le chômage des jeunes dans ma capture d’écran) change.
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En recommençant le processus, j’ai eu le droit à :
Et cela sera tout. Vous avez le choix entre le chômage, ou la discrimination religieuse. [Note : Vous avez d’autres choix, il suffit de s’amuser avec l’url] On s’adresse en priorité aux jeunes chômeurs ou entrepreneurs, en ratissant du côté de ceux ayant connu les HLM. Populiste ? Meuh non !
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Continuons notre voyage, et acharnons-nous à être des « sous-merdes ». Oui, c’est ce que veut dire le : « Non, je préfère regarder les autres marcher »
Bordel, encore un déroulé ! Mais c’est pas vrai, il est pire que le pire markéteux-boutonneux-expatrié-à-Bangkok !
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Encore une fois : musique. Encore une fois, il me propose un argument alternatif. Et celui-ci est… Scandaleux !
Pour ceux qui l’ignorent, Emmanuel Macron a été banquier d’affaires chez Rothschild & Cie. Si ce n’est pas la même banque Rothschild citée dans les Panama Papers (Même si c’est la même famille… Ce n’est pas le même groupe qu’on nous dit !), il en reste que cet argument est proposé par quelqu’un ayant travaillé pour des banques. C’est mon côté gaucho qui parle, je vous l’accorde, mais je trouve cela d’une ironie sans nom…
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On reprend notre exploration : « Je voudrais bien, mais je n’y crois plus ».
Alors, à votre avis… ? OUI ! On a le droit une nouvelle fois au déroulé. Plus court cette fois-ci, et sans argument alternatif. Non, pour ce nouvel estoc, on tente le tout pour le tout avec l’argument de mémère pépère : les enfants !
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Et là, on n’a plus que le choix entre « j’y vais » et le « laissez-moi du temps ». Ça part donc du principe que nous n’avons plus d’objection. Mais, je suis mesquine, je clique sur « pourquoi pas, laissez-moi un peu de temps » et…
Et voilà… On n’a pas su me convaincre de donner mes informations et mon email ? C’est pas grave, je n’ai qu’à laisser mon email pour être convaincue…
Récapitulatif du site « En Marche ! »
Et là, on comprend mieux l’url de départ qui comporte « parcours » avec tout plein de # et de chiffres… Parce qu’en fait, ce site n’est qu’un déroulé markété, visant à récupérer notre adresse mail + nos informations, sans nous expliquer la démarche.
- On nous vend le produit, sans qu’on n’en connaisse sa composition, ni même son but.
- On nous vend donc un mouvement politique qui ne repose sur aucun programme.
Vous n’avez pas eu le courage de lire le déroulé exact ? Permettez-moi de le synthétiser en une image :
Une vidéo de présentation qui a de quoi faire polémique :
Belle musique qui fait rêver. Belles images issues de banques d’images, on le sait… Beau discours… ?
Non. Pas « beau discours ». Pas du tout même ! Lisons entre les lignes, les enfants. Banque d’images ou non, le choix des mots et les images associées ont leur importance en communication. Emmanuel Macron est issu du monde bancaire, il connait le marketing. Nous venons de le voir, son site est markété. Croyez bien que la vidéo l’est d’autant plus. Je vais faire des captures de la vidéo, et en-dessous, le commentaire que l’on entend. Vous êtes prêts ?
On y va :
Ouverture sur des gens, dans la rue, dans des bars, aux universités, au marché. On commence par nous présenter l’image du Français. Le ton est directement donné par le choix du vocabulaire « aller plus loin », « oser », et pis : « en finir avec l’immobilisme ». Postulat de départ : les gens veulent du changement… Et ça ne « date pas d’hier »… Non, en effet, en 2012, un certain Français Hollande avait pour slogan « Le changement, c’est maintenant ». Cette introduction a – selon moi – deux visées : nous dire introduire la « problématique » qui arrive dans la suite de la vidéo, et rappeler les engagements du Président actuel… Pour mieux s’en détacher ?
En image, le mal Français, nos blocages qui nous sclérosent, sont symbolisés par des manifestations. Nous sommes responsables des blocages, puisque nous manifestons. Se peut-il, en marge des mouvements contre la loi El Khomri et des mouvements #OnVautMieuxQueCa ou encore #NuitDebout que cela soit une coïncidence ? Vous y croyez ? Avec un tweet annonçant ce mouvement « En marche ! » publié en date du 06 avril dernier, vous croyez réellement que ce choix d’images est anodin ? Non, moi non plus. Nous avons donc un Ministre qui se veut « proche du Peuple » qui commence par nous expliquer que le problème vient de nous et de notre protestation. Ça ne vous rappelle pas le déroulé du site qui nous propose de façon peu subtile d’être soit la solution, soit le problème ?
Chômeurs, SECU peut-être (l’image du ticket), hommes d’affaires dans un huis-clos, ou dans une sorte de bâtiment parlementaire. Nous avons l’illustration du propos démago parfait : on tape sur les assistés, et sur les « élites » (Dont fait partie Macron, ne l’oubliez pas), pour dire que le pauvre Français n’a rien… Le parti « Socialiste », « Les Républicains », ou encore « Le Front National » usent des mêmes arguments.
Je ne sais pas « Man »… Peut-être que la liberté n’a rien à voir avec ce discours sur les chômeurs, ce discours politico-économique. Peut-être que la liberté s’intéresse un peu plus à la liberté de manifester, par exemple. Ce que tu appelles « du blocage ». Ou peut-être qu’elle est l’inverse d’un Etat d’urgence permanent que tu soutiens ? Alors, de quelle liberté parlons-nous ? Puisque nous parlons de blocages, d’économie, que nous avons en face Emmanuel Macron, Ministre de l’Economie, de quelle liberté parle-t-il ?
De quelle liberté parlons-nous déjà ? La bourse est-elle un blocage comme le suggère la vidéo ? L’ascenseur social n’est-il qu’un travail de bureaux ?
Je ne sais pas « Man »… Peut-être dans les mesures sexistes sur le harcèlement dans le métro ? Peut-être dans le projet de déchéance de nationalité ? Peut-être dans le fait qu’on peut dire « PD » sans problème dans ce pays ? Ou encore… Peut-être dans la dernière loi concernant l’égalité des chances face à l’élection Présidentielle… ?
Nous dit le Ministre de l’Economie… D’une économie Française et d’un Gouvernement Français qui laissent ces fameuses barres d’immeubles perdurer, et le taux de chômage des banlieues exploser.
« Qu’est devenue la fraternité ? Mais on entend aussi d’autres choses. Que notre pays a des atouts pour réussir. Que les français ont du potentiel et un talent qui n’attendent que d’être reconnus pour repartir de l’avant. »
Non, pas d’image. Parce qu’ici, nous avons une suite de clichés sur l’artisanat, l’industrie, le coworking dans ce qui semble être une start-up. Ici, pour les « atouts pour réussir » de notre pays, nous avons comme seule illustration des atouts économiques. Nos seuls talents résident dans le travail. Et cela, c’est le Ministre de l’Economie, en marge de la loi travail, qui nous le dit.
En entreprise. En agriculture. On se remet à travailler pour régler les problèmes. Merci.
« Car on ne fera pas la France de demain sans faire place aux idées neuves, sans audace, sans esprit d’invention. »
Non, une nouvelle fois, le calendrier social, les revendications autour de la loi travail, les interrogations sur la suppression du travail, et les mouvements sociaux qui émergent de toutes parts n’ont rien à voir avec ce texte. Non. Vous n’y croyez pas ? Moi non plus.
Ou « en n’acceptant pas la mondialisation, la surexploitation de l’Humanité, etc. ». L’image est celle d’humains entassés dans une usine. D’Asiatiques, plus précisément. Et on sait tous qu’on envie leurs conditions de travail…
Daesh, et la possibilité d’être riche. La menace des barbus qui est le vrai danger de ce monde, et la promesse d’un monde meilleur à base de stock-options. On nous agite la peur et l’argent. On a le choix entre la mort, ou la réussite économique. Après tout, n’était-ce pas ce même Emmanuel qui nous expliquait qu’on doit tous rêver d’être milliardaires ?
« On ne fera pas la France de demain sans faire place à une génération nouvelle, combative, entreprenante, audacieuse et belle. Oui… Il est temps de se mettre en marche. »
Est-ce que la nouvelle génération fait référence à une « nouvelle génération politique » ? Est-ce que cette nouvelle génération doit être uniquement « entreprenante » ?
- Je vous repose la question du début : de quelle liberté parlions-nous ?
- De celle d’entreprendre ? De celle d’embaucher et de faire travailler comme l’on veut ?
- De quels blocages parlons-nous ?
- Des blocages sociaux comme illustrés dans la vidéo ?
- A quel moment notre bon Emmanuel met « En Marche ! » son mouvement ?
Cette vidéo ne doit pas choquer parce qu’elle utilise une banque d’images. Cette vidéo a de quoi choquer car elle explique par A+B que tous nos problèmes sont d’origine socio-économique. Que nous râlons trop, que nous ne travaillons pas assez, et que nous refusons les changements – si nécessaires, pourtant – à la survie de notre pays.
Cette vidéo et ce site, dans leur construction, ne tournent qu’autour des questions d’argent, de travail, de cette opposition – caractéristique du Capitalisme – entre « travailleurs et chômeurs ». Entre « problème et solution ». Entre « assistés et sauveurs ».
Ce manifeste markété, qui ne propose aucune solution, qui se contente de nous obliger à nous placer dans l’une ou l’autre case précitée, survient au moment même où un énorme scandale financier éclabousse nos élites, au moment même où les gens commencent à souhaiter penser un système financier et politique « autre ». Ce… « En marche ! » arrive à un instant crucial, pile « au bon moment », alors que la jeunesse se mobilise justement.
Et qu’est-il ce Macron ? Qu’est-il sinon ce « petit jeune » de la classe Politique, humm ?
- Ceci, mes amis, est un bel exemple de tentative de récupération…
- Ceci, mes amis, est l’application parfaite des techniques de communication des vendeurs de rêves, appliquées à l’échelle d’un pays.
Tu mens, il a un vrai projet !
Ah bon ? Je me suis inscrite. Oui, parce que vous savez que je ne m’arrête jamais là. J’ai donc utilisé un vieux prête-nom pour « adhérer » à son truc. Tant pis si je fais grossir les chiffres.
Apparemment, je fais confiance et j’adhère à… Nous l’avions vu : je ne sais pas vraiment. Je suis donc une « engagée » du « je ne sais pas qui marche ». Il n’y a pas plus belle analyse de l’état de la Politique en France, croyez-moi ! Oui, nous nous engageons souvent sans savoir pour quoi…
Après avoir confirmé, je suis redirigée vers une page où notre bon Emmanuel nous fait un discours en vidéo. Oui, de la même manière que les vendeurs de rêves, je sais. La vidéo n’est disponible que pour les personnes ayant le lien OU s’étant inscrites. Voulant vous éviter une inscription, vous pouvez retrouver la vidéo ici.
Il commence par nous dire « merci », qui nous explique que le mouvement n’a pas d’autre existence que celle que les adhérents lui donnent. En gros : ce mouvement est un mouvement citoyen. On reboucle ensuite sur les arguments de la vidéo de présentation dont je parlais tout à l’heure, les fameux « clivages ». Puis, Macron nous dit qu’on est pour des solutions, je cite : « plus radicales ». Voilà, ce mouvement, c’est ça : un mouvement – par définition – extrémiste. Il nous dit « qu’il a besoin de nous ». Alors même que ce mouvement n’aurait pas de leader.
En prenant donc les codes des mouvements populaires qui fleurissent actuellement, Emmanuel nous explique qu’on vient d’adhérer à un mouvement aux idées et solutions radicales, dont il serait la tête.
C’est beau.
Quoi ? Emmanuel Macron n’est pas en train de s’offrir une mailing-list et une « grosse preuve sociale » en direct ? Oh si ! Sur le site, vous avez la possibilité, via le menu, de cliquer sur un onglet « Emmanuel Macron ».
Je vous le mets dans le mille : storytelling. Pour ceux qui ne sont pas familiers avec le jargon du milieu, c’est un procédé utilisé pour « raconter une histoire dans le but de ». Oui, j’enlève direct les paillettes, on est entre nous. Dans son déroulé, on a donc le classique « Officiellement, je suis », et le « Maintenant, je vous dévoile mon vrai « moi », en toute intimité », si cher aux communicants. Il nous parle de ses valeurs, puis, de sa volonté de s’engager en Politique.
Encore une fois, ne nous y trompons pas, quoi qu’il prétende dans ses vidéos : on est là pour le porter, lui, à l’Elysée, personne d’autre !
Tout tourne autour de la loi Travail
Partout sur le site : des argumentaires sur son « combat contre les blocages en France ». On y retrouve le langage policé du politique-markété qui sait très bien jongler avec ses nouveaux outils, et qui – je ne me lasserai jamais de le dire – n’a pas choisi son moment au hasard :
« Ces blocages, ce sont les normes et les contraintes empilées depuis des décennies, qui découragent les énergies, et pénalisent trop souvent les plus faibles au lieu de les protéger. »
« Pourtant, malgré les doutes, la plupart de nos concitoyens voient la réalité en face et sont plus lucides qu’une large partie de notre classe politique. Dans leur grande majorité, ils ne demandent pas plus de protection, encore moins le statu quo. Ils veulent que le pays se remette en mouvement. »
Vous le voyez venir ? Non, ce n’est pas moi qui cristallise sur cette loi Travail. Je soutiens que tout ce bordel n’est là que pour ça. Vous ne me croyez pas ?
« Vouloir préserver le statu quo sur le marché du travail avec le chômage de masse que l’on subit depuis 30 ans, c’est ignorer la réalité et le fait qu’une partie importante de nos compatriotes […] n’y ont aujourd’hui pas accès. »
Alors… ? Oh, vous pensez que je tronque la réalité pour faire dire à Emmanuel son « noir secret » ? Je vous laisse vous inscrire pour aller lire la page /en-marche/ 🙂
Et donc, ma conclusion est la suivante :
Ce mouvement « En marche ! » est là pour surfer sur les mouvements et initiatives populaires, en les récupérant, le tout, pour nous expliquer que le travail doit être repensé de façon totalement libérale, sans oublier de claquer un bon coup un certain « Manuel Valls ».
En reprenant les codes de communication des vendeurs de rêves trouvables sur le Web (je vous invite à googler ce terme), Emmanuel Macron nous rappelle d’où il vient et ses vrais buts : grossir. Que cela soit politiquement, ou financièrement, je vous laisse choisir.
Tu as cette analyse, parce que tu veux pas te mettre en marche !
Eh bien non, cher lecteur. Je ne suis pas chômeuse, et je suis bien blanche. Donc, tu peux oublier tes « coupables désignés par TF1 ». Bon, en revanche, oui : je suis de gôôôche.
Cependant… Qui se souvient du discours de Macron au sujet du chômage et des jeunes ? Rappelons-nous sa belle vidéo (du début) et son histoire de potentiels, d’entrepreneurs, etc.
Je suis entrepreneur. Parce que je ne trouvais pas de travail, j’ai donc – comme nous disait de faire Emmanuel – créé mon propre travail. Je me suis donc « mis en marche ». Mais à titre personnel, j’estime que le travail est une aliénation totale que l’on doit repenser. Voilà pourquoi j’ai un vrai respect pour les initiatives que l’on voit de partout. Et voilà pourquoi j’ai pris le temps de pondre un pavé démontant cette tentative honteuse.
Je refuse qu’un gosse de riche, anciennement inspecteur des finances, anciennement banquier d’affaires, et actuel Ministre d’une économie délirante ; je refuse que cet homme, qui a pourtant tous les moyens aujourd’hui de faire « bouger les choses » ; je refuse de lui céder mon pouvoir démocratique en acceptant l’idée écœurante qu’il s’empare de mon combat, de mes problématiques, de ma démarche citoyenne.
C’est dans cet esprit que j’ai pris le temps et la plume de vous alpaguer :
- N’acceptons plus les escrocs politiques !
- Ce n’est pas parce qu’un texte est joliment copywrité qu’il est vrai !
- Ce n’est pas parce que c’est la merde financièrement dans notre pays qu’il faut voter pour n’importe qui !
- Ou qu’il faut haïr tout ou n’importe qui !
- Plus de Libéralisme ne règlera pas les problèmes du Libéralisme !
- Moins de Démocratie ne règlera pas les problèmes de notre Démocratie !
En clair : prenons le temps de réfléchir, pour une fois. Ce qui se joue actuellement, les enjeux de ce nouveau siècle sont bien trop grands et nobles pour qu’on se laisse avoir par simple flemmardise intellectuelle.
Oui, il faut nous mettre « En Marche ! », commençons par nous sortir les doigts du cul :
Dêmos = Peuple
Krátos = Pouvoir
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